Argentine : la lutte anti-impérialiste et l’extrême gauche

La présence du G-20 chez nous, comme le retour du FMI quelques mois avant, relance les débats sur la politique que l’extrême gauche devrait adopter. Et cela montre les limites et les erreurs du FIT[1] qui ne permettent pas à l’extrême gauche de se postuler dans son ensemble.

Il est évident que la réunion du G-20 à Buenos Aires implique l’arrivée des principales puissances et des puissances impériales qui pillent et qui détruisent la planète en fonction des intérêts de leur classe. Ils viennent de planifier leurs plans d’ajustement dans la région et dans le monde pour décharger la crise mondiale sur nos pays. Donc, de leur sommet viendront de nouvelles recettes que nous devrons affronter dans les rues.

Le gouvernement du président Macri et de sa ministre Bullrich promeuve la militarisation de la capitale et une campagne d’intimidation contre la population métropolitaine, avec des opérations médiatiques visant à éviter qu’à cette époque un fort rejet au G20 ne soit exprimée.

FIT : absent du contre-sommet et sans proposition alternative

Il y a de nombreuses raisons pour promouvoir une large campagne unitaire contre le G-20, pour développer toutes sortes d’initiatives unitaires, afin qu’elles aient le plus grand poids social et politique possible et que les groupes populaires qui répudient l’ingérence impérialiste puissent disposer d’un canal de mobilisation.

C’est une excellente occasion pour l’extrême gauche de mener un appel ouvert et d’être le protagoniste d’un immense contre-sommet, dans le cadre de plusieurs jours de lutte anti-impérialiste et anticapitaliste. Mais ce n’est pas la politique du FIT, qui n’a mené aucun appel et s’oppose à la participation au contre-sommet organisé par les autres forces les 28 et 29 novembre, à la Fac des Sciences Sociales (UBA) et à Plaza Congreso respectivement. Le FIT ne participe qu’à la manif finale, le 30. Il fera le minimum possible alors qu’il aurait dû mettre toutes ses forces contre le G-20.

La même erreur face au FMI

Cette action de propagande avait déjà eu le FIT à l’occasion du premier accord de Macri-FMI. À ce moment-là, il a refusé de participer aux manifs et aux meetings unitaires organisés par de diverses forces sur la Plaza de Mayo et dans d’autres centres politiques. Certains de ses membres nous ont même critiqués parce que nous avions participé à des actions unitaires contre le FMI, alors que placer l’extrême gauche au premier plan de la lutte contre le Fond était une tâche politique correcte et essentielle. A cette occasion, le FIT a tenté de dissimuler son abstention sectaire avec des déclarations et avec un meeting de compromis, fermé et de type électoraliste.

Un peu d’histoire

Il convient de rappeler que l’histoire du léninisme et du trotskisme est différente. Aux années ’20, la III Internationale sous la direction de Lénine et Trotsky diffusa, entre autres textes, ses Thèses de l’Est. En développant une politique anti-impérialiste audacieuse, il y a déclaré: « La classe ouvrière des colonies et des semi-colonies doit savoir fermement que seule l’expansion et l’intensification de la lutte contre le joug impérialiste de la métropole peuvent conférer à cette classe un rôle de premier plan à la révolution et que l’organisation économique et politique et l’éducation politique de la classe ouvrière et des éléments semi-prolétariens sont les seuls qui peuvent accroître l’ampleur révolutionnaire de la lutte contre l’impérialisme. Les partis communistes des pays coloniaux et semi-coloniaux de l’Est, qui sont encore dans un état plus ou moins embryonnaire, doivent participer à tout mouvement qui serve à ouvrir une voie d’accès aux masses. »

Au cours de ces mêmes années, Trotsky, sur la situation en France, recommanda la majeur audace et une offensive politique et une tactique du front unique avec les organisations réformistes et centristes. Logiquement et à juste titre, il lutta pour que les révolutionnaires fassent preuve d’une indépendance politique absolue pour continuer à gagner de l’influence. Ainsi, il a déclaré dans son texte[i]: « La politique du front unique, toutefois, ne contient pas en elle-même la garantie de l’unité de fait dans toutes les actions. Au contraire, à de nombreuses reprises, dans la plupart d’entre elles, l’accord des différentes organisations ne sera réalisé qu’à moitié, voire pas du tout. Mais il faut que les masses en lutte puissent à tout moment être convaincues que l’unité d’action a échoué, non pas à cause de notre intransigeance formelle, mais à cause de l’absence de volonté réelle de lutte des réformistes. »

Au sein des quatre premiers congrès de la III Internationale, au milieu des avancées fascistes dans plusieurs pays, son approche sur la manière d’agir est la suivante: « L’une des tâches les plus importantes des partis communistes est celle d’organiser la résistance au fascisme international, de se placer devant le prolétariat tout entier dans la lutte contre les gangs fascistes et d’appliquer avec force dans ce domaine aussi la tactique du front unique. »

Dans ce monde de Trump et de Bolsonaro, une orientation similaire serait sans doute correcte.

Pour une extrême gauche cohérente

Comme dans tout débat clé, les conclusions sont décisives. La première chose évidente est que l’électoralisme éloigne l’extrême gauche des tâches et des luttes politiques qui nécessitent une impulsion consciente. Le FIT tombe en permanence dans une déviation opportuniste, en ne mettant pas toute sa force dans la lutte anti-impérialiste et anticapitaliste, en refusant une large unité d’action.

Le MST, ainsi comme nous avons participé à chaque action commun contre le FMI, face à l’arrivée du G-20 nous avons décidé de faire partie de la plus large unité d’action dans les rues et dans divers événements unitaires visant à dénoncer le plan des puissances impérialistes qui vont se rencontrer ici.

Nous aurons un grand acte anti-G20 le vendredi 23N sur la Plaza Congreso, nous participerons à de divers ateliers à la Fac des Sciences Sociales le 28N et des panels communs, ainsi qu’un meeting central sur Plaza Congreso le 29N, dans le cadre de l’espace « Confluence contre le G-20 ». Dans ces activités, nous soutenons le PSOL du Brésil à exprimer sa lutte contre Bolsonaro. Enfin, nous aurons une participation importante du MST dans la manif commune du 30N.

Dans chacune de ces activités diverses, nous exprimerons nos propres positions et propositions, garantissant ainsi les deux prémisses du marxisme révolutionnaire : la plus large unité dans la rue et l’indépendance politique permettant de développer toutes les opinions de l’extrême gauche anti-impérialiste, anticapitaliste et socialiste.

Nous invitons tous nos lecteurs à faire partie de ces événements et à renforcer avec le MST un projet d’extrême gauche unitaire et cohérente dans notre pays.

Sergio García

[1] Front de Gauche et des Travailleurs, formation politique d’un secteur du trotskisme. FIT est l’acronyme de son nom en espagnol (Frente de Izquierda y los Trabajadores).

[i] Le front unique et le communisme en France, 1922.