France : Ni le gouvernement ni l’Assemblée ne nous représente !

« L’émancipation des travailleurs sera l’œuvre des travailleurs eux-mêmes »

Ecrire : La Commune

La présidentielle et les législatives en France sont à l’image du chaos politique qui parcourt l’Europe : la bourgeoisie s’accroche à ses sièges et fait tout pour perdurer mais rien ne sera plus jamais comme avant. La crise économique, politique et sociale ne finit pas de s’approfondir depuis 2009 tandis que la pandémie et la guerre en Ukraine provoquent une déstabilisation mondiale sans précédents depuis la seconde guerre mondiale.

Une élection sans précédents sous la Ve République

  • Une abstention record

L’abstention en hausse pour les présidentielles depuis 1974 a atteint cette année un niveau record : 34,25 % des inscrits au 2e tour. Pour les législatives, elle est traditionnellement encore plus forte. Si elle ne dépasse pas le record du 2e tour de 2017 (61,6 % des inscrits), elle reste massive : 57,3 % des inscrits !

La France qui s’abstient c’est 7 jeunes sur 10 ; ce sont aussi les deux tiers des ouvriers et des employés ! Bref une grande majorité des forces jeunes et des travailleurs/eusses de première ligne.

Pour preuve, les taux d’abstention dans les villes ouvrières : Roubaix (8e circ.) 67,55 % ; Vénissieux, 65,53 % ; Forbach, 65,50 % ; Longwy, 64,11 % ; Tourcoing, 63,18 % ; Corbeil-Essonnes, 62,20 % ; Colmar, 61,40 % ; Vitry-sur-Seine, 59,95 % ; Sarreguemines, 59,71 % ; Mantes-La-Jolie, 59,52 % ; Vaulx-en-Velin, 59,42 % ; Hénin-Beaumont, 58,37 % ; Lens : 58,33 % …

C’est ainsi que l’immense majorité (479 élus sur 577, soit 83 %) des députés ne représentent qu’entre 20 % et 30 % des inscrits.

Enfin, 60 % des députés sont « des cadres et professions intellectuelles supérieures » (ils ne représentent que 9,5 % de la population) ; à l’inverse, 5,4° % des députés sont des ouvriers et employés alors qu’ils représentent 28,2 % de la population !!! Enfin la féminisation de l’Assemblée recule : 37,3% de députées ! Bref une assemblée totalement déconnectée de la société !

  • Un président très mal élu, une majorité relative et des opposants tout aussi mal élus

Au final, il y a un président de la République très mal élu (38,5 % des électeurs inscrits), 2e président le plus mal élu de la Ve République, juste derrière Georges Pompidou en juin 1969. Un président qui, pour la première fois dans l’histoire de la Ve République, ne recueille pas la majorité pour faire passer son programme ! Loin des 289 voix nécessaires à la majorité, le parti de Macron, désormais appelé Renaissance (sic !) n’a que 168 députés et n’atteint qu’avec les 48 députés Modem et indépendants (Bayrou) et les 28 députés Horizons et apparentés (Edouard Philippe) le chiffre de 244 députés … bien loin des 306 députés LaREM de 2017 auxquels il fallait additionner les 42 députés Modem. Les principaux complices de Macron, Richard Ferrand, Christophe Castaner, tout comme Jean-Michel Blanquer ont été rejetés et défaits aux législatives par ceux qui vont encore voter !

C’est une défaite sans nom pour Macron qui se retrouve sans majorité pour appliquer son programme de régression sociale !

Mais que dire des députés les plus connus, opposants à Macron, si ce n’est qu’ils sont également très mal élus, avec une abstention très élevée : Marine Le Pen (RN), élue à Hénin-Beaumont avec 58,37 % d’abstention ; Fabien Roussel (PCF-NUPES) élu à Saint-Amand-les-Eaux avec 60,52 % d’abstention ; Éric Coquerel (LFI-NUPES) élu à Épinay-sur-Seine, Saint-Denis Sud, Saint-Ouen avec 62,18 % d’abstention ; Olivier Faure (PS-NUPES) élu de Seine-et-Marne (77) avec 61,30 % d’abstention !!

  • Le processus de 2017 est achevé : les volailles PS et LR ont fini d’être plumées !

Les partis piliers de la Ve République, le PS et LR, respectivement 1,26 % et 3,44 % des inscrits aux présidentielles, sont en voie de disparition. La bourgeoisie a fait de Macron son champion et a reporté ses voix, autrefois acquises tantôt au PS et tantôt au RPR puis à l’UMP (ancêtre des LR), vers la coalition Ensemble ! Plumé à droite par Macron, et à l’extrême droite par Le Pen et Zemmour, LR conserve à court terme un rôle politique, celui de faiseur de roi ou, plus précisément, de faiseur de majorité au service de Macron. Cette subordination ne pourra entraîner qu’un effacement politique définitif en faveur de Macron, de Le Pen et autres Zemmour.

Le PS, après avoir subi une première saignée en 2017 au bénéfice de Macron et LaREM, subit en 2022 une nouvelle hémorragie, cette fois-ci au bénéfice de la LFI de Mélenchon. Illusion du vote utile, illusion du vote à gauche, Mélenchon remporte sa revanche, il devient majoritaire … au PS ! Vu l’ampleur de la grève du vote dans les villes et quartiers ouvriers, Mélenchon recueille essentiellement les voix des couches les plus militantes et partisanes (politiques, syndicales, associatives) ainsi que, par rejet de Macron, celles d’une partie de la petite-bourgeoisie en phase de déclassement. Bien sûr, une grande partie des électrices et électeurs de Mélenchon charge son programme d’un contenu politique qui n’existe pas, celui de la rupture avec le capitalisme. La LFI, c’est ce qu’il reste de l’aile gauche du PS en version écologisée et boboïsée.

  • La IIIe et la IVe Républiques au secours de la Ve agonisante

Pour se maintenir en place, ils sont TOUS prêts à tout ! LaREM, tout comme le PS en son temps, laisse le RN croître puisqu’avec un tel challenger c’est la victoire assurée … au point de ne donner aucune consigne de vote lors des duels NUPES/RN.

Certains sont tellement avides de pouvoir qu’ils s’imaginaient même devenir premier ministre de Macron : y allant de son couplet nationaliste, Mélenchon a assuré à tous les micros que sur les sujets internationaux, le couple exécutif Macron-Mélenchon ne parlerait que d’une seule voix… Sur le voyage de Macron en Ukraine le 16 juin, « comme il est à l’étranger, sur une zone de guerre, je propose qu’on évite les polémiques ».

Pour obtenir la présidence de la Commission des finances, le bras droit de Mélenchon, Éric Coquerel a déclaré : « L’idée n’est pas de contrôler ou faire je ne sais quelle chasse aux sorcières individuelle » …

D’aucuns se sont récriés contre les 2 vice-présidents RN élus avec les voix de la majorité présidentielle : mais les vice-présidents NUPES n’ont pu l’être qu’avec ces mêmes voix ! Vous partagez la table, les serviettes et les torchons !

Sans parler du coq PCF Roussel qui, après avoir déclaré être plus inquiet du chaos dans la rue que de celui à l’Assemblée, a émis l’hypothèse de faire partie d’une coalition gouvernementale avant de rétrocéder face au tollé dans ses rangs !!!

  • Et tout ça, ça rapporte !

Ils ont tous les mains dedans ! Même Lutte ouvrière qui se réjouit de son 1% des voix dans 270 circonscriptions, soit 229 000 voix x 1,64 euro : LO sera subventionné par l’État à hauteur de 375 560 euros en 2023 et chaque année jusqu’en 2027… Une paille par rapport aux 9,61 millions d’euros d’Ensemble ! 9,57 de la NUPES, 7 du RN, 4 pour LR … sans compter les aides publiques attribuées en fonction du nombre de parlementaires et versées à l’association de financement de chaque parti (chaque parlementaire comptant pour 37 042 euros) !

Une classe ouvrière prise à la gorge

Le Parti Ouvrier Indépendant, soutien de Mélenchon, a beau mettre en 1ère page de son journal la déclaration de Mélenchon du 12 juin sur la NUPES :« Elle regarde le peuple français avec la tranquillité du travail accompli et d’une perspective radieuse qui se présente à lui » … la classe ouvrière ne voit aucune perspective radieuse.

Pendant qu’ils s’auto-congratulent tous, la classe ouvrière n’en peut plus : la hausse des prix s’est portée en juin à 5,8 % (contre 5 ,2 % en mai). La hausse des prix concerne essentiellement les prix de l’énergie (+27,8% en mai) !

C’est pourquoi les grèves pour les hausses de salaires se multiplient à travers toute la France. La Tribune du 21 juin : « C’est une vague qui déferle sur la France, celle des mouvements de grève. »

De fait, les mouvements touchent tous les secteurs : aéroports (9 juin, personnel de l’aéroport de Paris-Charles de Gaulle ; à partir du 1er juillet et jours suivants, à l’appel de l’intersyndicale des personnels des aéroports parisiens), conducteurs de camions poubelles de la Ville de Paris, SNCF (6 juillet), RATP, chaîne de parfumerie Marionnaud (mai) , agents de l’énergie chez EDF, RTE, Enedis, TotalEnergies (grèves ponctuelles et grève nationale le 28 juin), Soitec, fabricant français de substrat pour semi-conducteurs près de Grenoble (10 juin), maroquinier de luxe Arco à Châtellerault, Ratier et Aéro à Figeac (20 juin) …

Ce mouvement n’est pas isolé en Europe où des grèves très suivies se font jour : au Royaume-Uni où s’est déroulée une très grosse grève de cheminots ; en Belgique dans les aéroports ; chez Ryanair dans toute l’Europe pour ne citer que quelques exemples emblématiques …

Quelle perspective radieuse pour les chômeurs ? Ils subissent des sanctions de plus en plus sévères ainsi que le démontre un rapport annuel présenté mardi 28 juin par Jean-Louis Walter, le médiateur national de Pôle emploi chargé de traiter les différends entre l’opérateur public et les usagers : il détaille les effets de la réforme de l’assurance-chômage qui a « rigidifié les pratiques, en les enfermant dans un barème plus sévère encore et en fournissant une légitimité nouvelle aux postures excessives ». Le médiateur observe « un usage fréquent des radiations de six mois et surtout [la] suppression définitive du revenu de remplacement ». Certaines décisions sont « véritablement disproportionnées, tant dans leur gravité que dans leurs conséquences », les personnes se retrouvant sans prestation ni même accompagnement.

Le parti de l’Ordre1

« Nous avons besoin d’une majorité solide pour assurer l’ordre, à l’extérieur comme à l’intérieur de nos frontières », a menacé Macron le 14 juin dernier sur le tarmac d’Orly.

Ainsi donc le parti de l’Ordre est revenu … L’Outremer est désormais sous la coupe du ministère de l’Intérieur : c’est dire comment sont considérés les DOM-TOM ! Seule la répression leur est réservée ! Une nouvelle loi sur la police est en gestation. Comme nous le rappelions dernièrement, le ministère de l’Intérieur a passé commande à la société SOFRAME de 90 véhicules blindés entièrement dédiés au maintien de l’ordre. En France comme ailleurs, les budgets de la Défense sont en progression, pour l’extérieur comme pour l’intérieur …

Pour un plan d’urgence !

Ni le gouvernement ni l’Assemblée ne nous représente ! C’est un gouvernement de criminels et de corrompus : Abad, accusé de viols, qui vient quand même d’être démissionné ; Darmanin, accusé de viols, qui reste ministre de l’Intérieur ; Dupont-Moretti accusé de conflits d’intérêts, ministre de la Justice ; Braun-Pivet (celle qui a étouffé l’affaire Benalla, le garde du corps de Macron visé par une commission d’enquête), élue présidente de l’Assemblée …Il n’y a rien à attendre de Macron, de ses ministres et de ses députées. Sauf le pire !

« L’émancipation des travailleurs sera l’œuvre des travailleurs eux-mêmes » et bien sûr des travailleuses ! Un plan d’urgence est nécessaire. Celui que nous proposions dès décembre 2020 ne demande qu’à être débattu et réactualisé avec les autres organisations révolutionnaires de ce pays. Il est ici :

https://www.lacommune.org/Parti-des-travailleurs/archives/France/Plan-d-urgence-contre-le-chomage-la-pauvrete-et-Macron-i1944.html

Nos principales revendications (pour ne citer que celles contre la misère et la vie chère) sont simples et immédiates :

– Augmentation générale de 500 euros nets des salaires, des minima sociaux et des pensions à égalité hommes et femmes ;

– pas un salaire, pas une retraite en dessous de 1900 euros nets ;

– indexation des salaires et des retraites sur les prix ;

– retour à la retraite à 60 ans, pour 37,5 annuités de cotisations et un taux de remplacement de 75 % ;

– baisse et blocage des prix sur les produits de première nécessité ;

– suppression de la TVA ;

– retour de l’ISF

– défense inconditionnelle de la Sécurité sociale

1. Le thème principalement fédérateur des sympathisants du parti de l’Ordre, créé en 1848 pendant la seconde République, était de clore « l’ère des révolutions ». Ayant pour chefs Thiers et Guizot et autres partisans de l’ordre et de la sécurité, le parti de l’Ordre soutient la candidature de Louis-Napoléon Bonaparte avant que celui-ci ne le désavoue lors du coup d’État du 2 décembre 1851.