Dirigeants syndicaux, arrêtez de discuter !
Ce gouvernement veut liquider la « protection sociale à la française » et son système dit de retraite par répartition : son but est de faire main basse sur l’énorme budget de la Sécurité sociale mais aussi d’offrir la protection sociale aux assurances privées.
Qu’est-ce que la « protection sociale à la française » dont fait partie notre actuel système de retraites ? Elle est financée par le salaire différé. Il existe le salaire brut, la somme totale qui est due au salarié et le salaire net, ce qu’il touche à la fin du mois, une fois sa part de sécurité sociale enlevée. C’est l’argent que les salariés mettent dans une caisse commune pour s’assurer mutuellement, pour leur santé, leur retraite, selon le principe de la solidarité ouvrière : chacun cotise pour tous et tous pour chacun. Chacun cotise selon ses moyens et perçoit selon ses besoins. Insistons, cet argent appartient exclusivement au travailleurs, les patrons ne versent rien qui leur appartienne en propre. Les cotisations prélevées servent immédiatement au paiement des pensions de retraites, des prestations sociales (maladie, famille…) Les actifs cotisent pour les retraités d’aujourd’hui, les bien-portants pour les malades. C’est cela le système dit de répartition solidaire.
Que prévoit le projet de Macron-Delevoye concernant les retraites ?
Il prévoit d’aller au bout du mouvement de liquidation du système par répartition qui a débuté en 1993. Quelle qu’ait été la couleur politique des gouvernements qui les ont portées, toutes ces attaques avaient un seul et
même objectif : la casse du système par répartition acquis de haute lutte par la vague des grèves insurrectionnelles de l’immédiat après-guerre.
Le « Régime universel » préconisé par Macron-Delevoye n’est ni plus ni moins que le moyen concret de liquider d’un seul coup tant le régime général que les 42 régimes spéciaux, comme ceux des Fonctionnaires ;
de la SNCF ; des Clercs et employés de Notaire ; de la RATP ; des Marins ; d’EDF-GDF ; des Mines ; des personnels de l’Opéra National de Paris ; de la Comédie Française ; du Port autonome de Bordeaux ; de la Banque de France, etc.
En échange, le gouvernement instaurerait la « retraite par points ». Comme le disait François Fillon, ancien Premier ministre, en 2016 devant un parterre de chefs d’entreprises : « Le système par points en réalité ça
permet une chose, qu’aucun homme politique n’avoue. Cela permet de diminuer chaque année la valeur des points et donc de diminuer le niveau des pensions ».
Tous les calculs menés à ce jour sur les retraites futures aussi bien des salariés du public comme du privé aboutissent au même constat : une baisse entre 15 et 25% du taux de remplacement par rapport à la situation actuelle !
Le gouvernement est-il en position de force ? Les derniers sondages d’opinion créditent Macron et son gouvernement de seulement 31 % de satisfaits, un des taux parmi les plus bas de l’histoire de la Vème République. A peine le même niveau qu’il y a un an, juste avant l’explosion du mouvement en Gilets Jaunes.
Quels sont donc les blocages alors ? L’ensemble des directions des partis et des syndicats du mouvement ouvrier qui, chacun à leur place, empêchent par tous les moyens les travailleurs de se battre.
Ce qu’il reste du Parti Socialiste et du Parti Communiste Français en passant par La France Insoumise de Mélenchon, la principale centrale ouvrière la CGT, FO et autres directions syndicales, aucun d’entre eux n’exige le retrait du projet Macron-Delevoye, aucun !
La CFDT faisant même savoir son accord pour une retraite individualisée sur la base d’un « régime universel » et de la « retraite par points ».
D’abord la « négociation » : En n’exigeant pas le retrait de la « réforme », en participant docilement aux « discussions », les principaux dirigeants du mouvement ouvrier indiquent à Macron qu’ils sont bien décidés à ne pas mener les vrais combats nécessaires à la classe ouvrière. Ils donnent le feu vert à Macron pour faire passer sa « réforme ».
A l’image de Philippe Martinez, secrétaire général de la CGT, qui a déclaré à la sortie de Matignon le 6 septembre 2019 : « Le Premier ministre a une mission, c’est de changer le système de retraites par répartition que nous connaissons aujourd’hui, et nous avons peu d’illusions » Pour Martinez, il « parait difficile de pouvoir influer sur la prochaine loi, alors que nous avons déjà discuté pendant dix-huit mois et qu’aucune proposition de la CGT n’a été retenue. » Le même Martinez qui pleure à Macron un « rendez-vous » pour lui expliquer les « propositions » de la CGT ! Alors pourquoi débattre à la fête de l’Humanité avec Delevoye et ses 10 000 euros de cumul salaire-retraites par mois ? Ensuite en proposant une « autre réforme » ou une réforme « alternative » : Ainsi Martinez invite « l’exécutif à repenser le système avec le monde du travail actuel, en y intégrant les nécessaires contributions des Gafam [Google, Apple, Facebook, Amazon et Microsoft] et des entreprises du numérique. ».
Ou Fabien Roussel, secrétaire national du PCF : « nous ne pouvons pas non plus en rester au statu quo. Car notre système de retraite par répartition a été affaibli. La contribution du monde du travail est toujours plus importante, tandis que celle du capital n’a cessé de diminuer. S’il y a une réforme à mettre en oeuvre, c’est celle qui rééquilibre le financement de la protection sociale et qui impose au capital de participer à relever le défi de l’allongement de la durée de la vie »
Or, financer les retraites sur la base des revenus financiers du Capital, les stock-options et les dividendes, c’est introduire les retraites par capitalisation. C’est faire entrer le loup dans la bergerie, en l’occurrence faire entrer l’Etat dans le système paritaire.
Puis la tactique des « journées d’action » de 24 heures étalées dans le temps:
Autrement dit, pas question d’appeler au « tous ensemble », à la grève générale. C’est encore la tactique des journées d’action et autres grèves « saute-mouton » qui démoralisent, divisent, car totalement inefficaces. De ce point de vue, le mois de septembre 2019 est un cas d’école : le 11 dans les hôpitaux ; le 13 à la RATP, où la grève a été suivie par près de 90 % des salariés, du jamais vu depuis 2007 ; le 19 à EDF ; ou encore Force Ouvrière, criant à tue-tête « défense du système par répartition », participant à toutes les discussions avec le gouvernement et appelant à manifester le samedi 21 tout en prenant soin de ne surtout pas déposer de préavis de grève. Enfin, CGT-FSU-Solidaires appellent à une journée interprofessionnelle de mobilisation et de manifestation le 24 contre la « réforme » des retraites sans jamais en exiger le retrait. Pourtant, tout le monde sait que si nous faisions grève et manifestions tous ensemble, au même moment, Macron sauterait comme un bouchon !
Malgré ce plan intersyndical de division des salariés, la volonté d’en découdre est intacte dans le pays à en juger par l’ensemble des actions que militants et salariés cherchent désespérément à établir entre eux, entre secteurs, entre professions pour tenter légitimement de « déborder » les appareils. Le mouvement politique profond pour chasser Macron est engagé.
Le projet de réforme Macron-Delevoye contre les retraites est le résultat de la collusion flagrante, au grand jour, des principales directions politiques et syndicales de ce pays avec ceux qui considèrent le système des retraites par répartition comme insupportable : le Capital et ses institutions, dont le gouvernement Macron est un rouage. Et la classe ouvrière saura bien assez tôt trouver les moyens de balayer ces obstacles. Et ceux qui prétendent l’aider doivent d’abord dire cette vérité-là.
Notre position : ni loi ni réforme !
Retrait du projet Macron-Delevoye
- Restauration de la Sécurité sociale sur ses bases fondatrices de 1945 : abrogation des ordonnances de 1987, des lois Balladur, Fillon, Sarkozy et Hollande
- Récupération et arrêt de toutes les exonérations de cotisations sociales
- Retour au droit au départ à la retraite à 60 ans
- Retour aux 37,5 annuités de cotisation pour une retraite à taux plein privé-public
- Retour au calcul de la retraite du privé sur les 10 meilleures années
- Réindexation des pensions sur les salaires des actifs
- Maintien du Code des pensions civiles et militaires et de tous les régimes spéciaux, harmonisation vers le haut de tous les régimes de prévoyance et de retraite
- Pas de pension inférieure au SMIC, le SMIC à 1 800 euros nets
- Augmentation de 400 euros des salaires et minima sociaux ; égalité salariale femmes-hommes
- Pour une loi interdisant les licenciements
24 septembre 2019