Déclaration de la Ligue socialiste révolutionnaire (RSL)
Le peuple du Kenya a arraché une victoire très importante ce 26 juin qui ne doit pas être sous-estimée. Lors d’une allocution télévisée, le président William Ruto a fait une « concession » au peuple mobilisé en déclarant qu’il ne promulguerait pas la Loi de finance 2024 et qu’elle serait abandonnée.
Cette victoire est d’autant plus importante qu’elle est sans ambiguïté. La Loi de finance, écrite main dans la main avec le FMI et la Banque Mondiale, imposait des augmentations brutales des taxes visant les travailleurs et le peuple pauvre dans l’objectif de rembourser la dette extérieure.
Des mobilisations massives ont pris de l’ampleur la semaine dernière à travers le pays, culminant avec une grève nationale et des millions de personnes battaient le pavé mardi 25 juin, alors que le Parlement débattait et votait la loi.
L’État a déployé une répression brutale, même tirant à balles réelles sur les manifestants, tuant au moins 23 personnes, et plaçant en détention des militant.e.s, des journalistes et des influenceurs dont 20 sont toujours portés disparus.
Mais la population n’a pas fait marche arrière, confrontant avec courage la répression, allant jusque l’invasion du Parlement, contraignant les parlementaires qui venaient de voter la loi à détaler par des tunnels.
La nuit suivante, des fusillades ont été signalées à Githurai, et l’on craint que des dizaines, voir des centaines de personnes aient été tuées. Malgré le silence des médias sur cet événement, cela a nourrit la colère du peuple qui a commencé à réclamer la démission totale du gouvernement.
Ce nuit, Ruto a envisagé d’adopter une ligne dure. Il a promis d’intensifier la répression, qualifiant les manifestants de « traîtres », ordonnant que l’armée descende dans les rues avec la police, coupant le service internet et menaçant de fermer les chaînes de télévision.
Mais le jour suivant, il a bien dû reconnaître sa défaite face à la mobilisation populaire en prononçant ces paroles on ne peut plus claires :
Lors d’un discours par TV, Ruto a dit : « Après avoir établi le bilan de la discussion concernant le contenu du projet de Loi de finance 2024, et après avoir écouté avec attention le peuple du Kenya qui a exprimé bruyamment son opposition à ce texte, je suis disposé à concéder son annulation et, ainsi, je ne signerai pas la Loi de finance 2024, puis on va la retirer ».
La RSL estime qu’il est indispensable de reconnaître cette victoire afin de rassurer et de ne pas oublier que la lutte paye, et que le peuple mobilisé devient une force inarrêtable.
En même temps, nous devons reconnaître que nous ne pourrons garantir le retrait total de la loi que si nous n’abandonnons pas la rue. Si Ruto ne promulgue pas le texte mais il ne le retire pas, il entrera en application 21 jours après son vote par le Parlement. Nous n’avons aucune confiance en Ruto. Si la promesse faite aujourd’hui parvient à nous démobiliser et à lui faire gagner du temps, il va la nier.
Si en revanche nous maintenons la mobilisation, nous pourrons sécuriser le retrait total de cette abjecte loi anti-populaire, et canaliser la confiance gagné vers la lutte en direction d’objectifs plus ambitieux.
La LSR appelle à poursuivre les mobilisations jusqu’au retrait total de la Loi de finance 2024, à continuer la lutte contre le gouvernement Ruto et tout son plan néolibéral et de pillage impérialiste, à obtenir la justice contre les responsables matériels et politiques de la répression meurtrière.
Nous appelons aussi à nous organiser pour débattre collectivement sur comment continuer la lutte pour tous nos droits bafoués et pour construire notre propre organisation politique, de celles et ceux qui vivons de notre travail, opposée aux capitalistes partenaires de l’impérialisme.
Nairobi, Kenya, le 25 juin 2024
Ligue socialiste révolutionnaire