Alors que la crise du système capitaliste qui engloutit le monde entier s’aggrave de jour en jour, ses conséquences sociales et politiques nous attendent. D’un côté l’intensification des tensions géopolitiques augmente le danger d’une guerre impérialiste ; d’un autre côté, l’assaut brutal du capitalisme sur notre planète se poursuit. Nous assistons à une polarisation sociale et politique de plus en plus profonde. Les dictateurs autoritaires de droite et les mouvements fascistes, menacent les libertés et les droits démocratiques fondamentaux. En revanche, les luttes grandissent et s’ouvre un espace à gauche.
Cette grande crise du système, nous donnera, aux socialistes révolutionnaires et à la lutte des classes, l’opportunité de faire de grands pas en avant.
Il y a une remontée mondiale de la lutte de classe de travailleurs et travailleuses. A tel point que tandis que la classe ouvrière tombe sous les seuils de la faim, de la pauvreté et du chômage, les formes aiguës de la lutte des classes et les révoltes qui éclatent ne surprennent plus personne. La montée soudaine de la lutte des classes, les rébellions et les situations pré-révolutionnaires marquent la réalité actuelle. Le monde entier se dirige vers de grands bouleversements sociaux, de manière inégale et combinée. Les années 20 sont prêtes à être le théâtre de grands combats. Nous sommes en face de deux grandes questions dont les réponses sont encore floues : « Est ce que les masses, dans son processus de luttes, se tourneront-elles vers le socialisme ? » et « la classe ouvrière peut-elle marcher vers des victoires révolutionnaires ? » Toute l’expérience historique a montré que la victoire du socialisme ne sera pas possible sans l’intervention consciente du sujet révolutionnaire dans le cours objectif de l’histoire. Il est donc essentiel de renforcer l’unité internationale des socialistes révolutionnaires et la construction de partis révolutionnaires dans chaque pays. Pour y parvenir, nous devons d’abord avoir une compréhension claire de la phase historique que nous traversons. Ce n’est qu’ainsi que nous pourrons déterminer nos tâches, concentrer nos forces, définir des politiques et des orientations, des stratégies et des tactiques adéquates.
La crise économique mondiale : l’impasse du capitalisme
La reprise économique qui a commencé après la suppression des mesures Covid-19 a déjà ralenti aux États-Unis, en Chine et en Allemagne. La hausse des prix de l’énergie, les hauts coûts de la vie, les pénuries dans le processus d’approvisionnement et la stagnation parallèle à l’inflation, sont un avant-goût de la stagflation. L’ère de la consommation bon marché et de l’emprunt est révolue. Et les capitalistes n’ont pas de modèle alternatif à nous offrir.
Ayant vécu la Grande Crise de 1929, Schumpeter, inspiré de Karl Marx, a défini le motif de renouvellement constant du capitalisme par le concept de destruction créatrice. Pour Schumpeter, les crises économiques étaient des périodes de progrès et de croissance, lorsque la destruction créatrice atteignait son apogée. Car, selon lui, le système se renouvelait dans les crises par l’absorption des entreprises les moins performantes par les plus dynamiques. Cette destruction, créée par le capital sur la vie humaine et la nature au nom du profit et de l’accumulation, a été acceptée comme critère du dynamisme du capitalisme.
La Grande Crise de 1929 fut un processus de destruction à l’échelle mondiale. De nombreuses banques ont fait faillite, des entreprises et des usines ont fermés. Le chômage des grandes masses et la faim se sont emparés du pays central de la crise : les États-Unis. Les entreprises moins rentables ont été remplacées par des entreprises plus modernes et plus puissantes ; la destruction du capital en tant que travail accumulé s’est poursuivie avec la Seconde Guerre Mondiale. La destruction massive de l’ensemble du continent européen, de l’Asie de l’Est et du Sud-Est, et sa reconstruction, ont été la base du taux de profit capitaliste pour atteindre un niveau d’investissement extraordinaire et du boom des années 50. Tout cela mis à profit par la trahison du stalinisme, institutionnalisée dans les accords de Yalta et de Potsdam.
Cependant, en 1929 la destruction créatrice que Schumpeter chérissait tant, a été abandonnée, car les conséquences politiques de la destruction -telles que les révolutions, le nazisme, la guerre mondiale- étaient également effrayantes pour la bourgeoisie. Les années 30 furent une période extrême qui effraya énormément à la bourgeoisie capitaliste.
Bien sûr, en 2008, les dirigeants du monde entier, ne pouvaient pas se permettre une nouvelle destruction créatrice face à la crise capitaliste, principalement parce qu’ils ont peur des rébellions et des révolutions, ils ont préféré réduire l’ampleur des destructions en sauvant les entreprises en faillite.
La crise de 2008 n’en est qu’un exemple. La Réserve Fédérale des États-Unis, d’une part, a fourni au système financier environ 3.600 milliards de dollars entre 2008 et 2014 via l’achat de dettes bancaires en défaut, d’instruments hypothécaires et de titres de créance du Trésor ; d’autre part, elle a créé une expansion monétaire en fixant les taux d’intérêt à 0,25% pendant sept ans à partir de fin 2008. Une autre manière pour éviter la destruction et la crise, a été mise en place avec le TARP (Troubled Asset Relief Program) avec 700 milliards de dollars pour sauver les banques et les entreprises en danger de faillite. Outre des banques centenaires, des compagnies d’assurance, General Motors, Chrysler et GMAC (Ally), les trois plus grandes entreprises automobiles des États-Unis, ont également été sauvées par ces mécanismes. Avec ces politiques, la destructivité de la crise de 2008 a peut-être été freinée un certain temps, mais elles n’ont pas pu détruire l’unité entre crises et rébellions. Les mouvements d’occupation dans divers pays, les révolutions en Egypte et en Tunisie et la grande rébellion en Grèce sont les premiers exemples qui nous parviennent. Les travailleurs.euses et la jeunesse qui sont descendus dans les rues, se sont repliés et vaincus à certains endroits, certes. Mais dans l’ensemble, les puissances capitalistes n’ont pas pu empêcher la lutte de classes de s’approfondir. Dans la phase pré-pandémique, les épidémies sociales s’étaient propagées dans le monde entier. Il y a eu de grandes luttes sociales et des rébellions dans les centres occidentaux comme la France et les États-Unis, et dans de nombreux pays d’Amérique latine et d’Asie. En ce sens, 2019 a été l’année de la plus forte hausse de luttes sociales, ce qui a confirmé que nous étions entrés dans une nouvelle étape mondiale.
Nouvelle vague de crise et de rébellions
La pandémie a imposé une pause obligatoire à cette vague de combats mondiaux qui se poursuivrait en 2020, mais maintenant des soulèvements plus importants se préparent. D’abord, les pauvres du monde ont porté le poids de la crise de 2008 sur leur dos pendant 12 ans de suite. Comme si cela ne suffisait pas, la pandémie de Covid a laissé l’économie mondiale face à une destruction soudaine et généralisée. Une fois de plus, le système capitaliste a essayé de réduire la gravité de la destruction en utilisant des ressources publiques ; le montant des mesures mises en place par les États pour réduire l’impact économique de la pandémie a atteint 20.000 milliards de dollars. Depuis, ce sont les capitalistes qui ont profités la plupart de ces mesures. Pour réduire les tensions sociales, des ressources limitées ont été mise en place pour la classe ouvrière, dans certaines économies avec plus de ressources. Mais dans la grande majorité du monde, les travailleurs et travailleuses, étaient livrés à eux-mêmes, c’est-à-dire, ils ont dû faire face à la pauvreté, au chômage et à la faim.
Alors que dans le monde entier les inégalités augmentent fortement, il y a, en parallèle une énorme augmentation du nombre d’entreprises zombies pendant cette pandémie, qui sont maintenues en vie, grâce à des prêts, mais aussi, elles sont une vie déterminée par le soutien de l’Etat. Selon la Deutsche Bank allemande, une entreprise sur cinq cotée aux États-Unis est en fait une entreprise zombie. Le nombre de ces entreprises, que la Banque Centrale a laissé faire faillite, s’est multiplié ces derniers mois. Cela signifie que la crise du capitalisme s’étale dans le temps, le problème de la rentabilité ne peut être résolu que dans des domaines exceptionnels et temporaires, la reprise ne commencera pas et la pauvreté des travailleurs s’aggrave de jour en jour.
Le système capitaliste souffre de l’incapacité de surmonter sa propre crise. Le modèle néolibéral de mondialisation, introduit en réponse à la crise structurelle du capitalisme, qui a éclaté dans les années 70, et, avec la chute du mur de Berlin et de l’Union Soviétique, plus les privatisations qui se sont répandu dans le monde, certains « vendeurs de rêves » ont théorisé que cela permettrait de surmonter les crises pour toujours, mais cela est fini.
Il n’existe actuellement aucun modèle pour gérer la crise. Les conditions de mise en œuvre du modèle néo-keynésien discuté dans les milieux dits « progressistes » en réponse à la crise, sont absentes dans la réalité mondiale. Avec l’économie international surendettée, la domination du capital financier, la mondialisation à son apogée, les puissances impérialistes prêtes à s’étrangler les unes aux autres, et sans espoir de retrouver les taux de profit, le plein emploi, l’équité salariale, la régulation financière et la croissance économique qui composent le keynésianisme sont devenus un rêve.
Les capitalistes n’ont pas la recette pour sortir de la crise : ils n’ont pas non plus, de nouveau modèle d’accumulation du capital à nous offrir. C’est pourquoi ils continuent de freiner la crise, en faisant porter un lourd fardeau sur le dos des travailleurs, et ils continueront de le faire. Jusqu’à ce que les ouvriers disent basta à cette réalité.
Au lendemain de la crise de 2008, l’Etat chinois a soutenu l’économie mondiale et stimulé les marchés émergents, avec sa demande de matières premières et de commodities. Cependant, la Chine ne croît plus au même rythme qu’avant, son économie est entrée dans une spirale d’endettement et ses bulles d’endettement éclatent également. Un géant de la construction chinoise, Evergrand, est en faillite, avec une dette de 300 milliards de dollars en Chine, a révélé que l’industrie de la construction, qui représente 25% du revenu brut du pays, essaie de fonctionner avec une dette norme. En conséquence, cette fois, la Chine ne se place pas comme le moteur économique des pays arriérés. Il est possible que certains de ces pays, lourdement endettés au cours des années 2000 et dont les dettes ont culminé pendant la période pandémique, dans diverses situation de faillite, par exemple, la Grèce en 2015 et le Liban en 2019. Les vulnérabilités dans les pays sous-développés ont énormément augmenté. Ces pays, maillon faible du système impérialiste, sont secoués par l’instabilité ; il semble inévitable qu’ils soient témoins de nouvelles vagues de rébellions, de coups d’État, de guerres civiles et de grands événements de la lutte des classes.
Bien que les pays dominant de l’impérialisme veulent cette fois mettre en place une politique d’expansion monétaire avec des chiffres beaucoup plus importantes, les choses sont clairement pires qu’avant. Par exemple, l’alarme sonne pour les États-Unis, qui pensent pouvoir émettre de l’argent illimité sur la base du fait que leur monnaie est une réserve mondiale. La hausse de l’inflation aux États-Unis frappe à la porte ; on dit qu’une inflation de 5% peut devenir permanente. Ils ne peuvent pas continuer à donner du crédit gratuit et à imprimer de l’argent, alors que l’inflation est si élevée. Donc, l’outil « le plus puissant » contre la crise qu’ils ont entre les mains, ne servira à rien. Des pays comme la Turquie, le Brésil ou l’Argentine, qui sont considérés comme des économies encore plus fragiles, n’ont de toute façon pas cette option, c’est-à-dire : imprimer de l’argent dans ces économies ne signifie rien de plus qu’une dépréciation rapide de la monnaie locale, une hyperinflation et un effondrement économique et social
Crise alimentaire et climatique
Alors que l’économie mondiale fait face à des difficultés entre les mains d’un capitalisme épuisé, l’écosystème de la planète, les bassins alimentaires, les ressources en eau, les forêts et le système énergétique luttent pour survivre entre les mains d’un modèle capitaliste basé sur la consommation d’hydrocarbures. Le changement climatique mondial continue d’évoluer encore plus sévèrement et plus rapidement que les prévisions les plus pessimistes. Les centres impérialistes continuent de tenir des réunions inutiles sur les catastrophes écologiques tout en continuant à promouvoir un modèle extractiviste qui détruit la nature pour augmenter les profits des corporations. Ces efforts pour se laver le visage ne montrent qu’il est impossible pour le capitalisme de sauver la faune de notre planète, qui est au bord de l’extinction. Ce cours, qui a commencé avec le capitalisme comme mode de production dominant, s’est accéléré avec l’impérialisme et a atteint aujourd’hui un point critique. Le réchauffement climatique a progressé à travers des centres tels que la Grande-Bretagne et l’Europe continentale, l’Amérique, le Canada et le Japon ; elle s’est accélérée en engloutissant directement le reste du monde par le biais de la coercition impérialiste coloniale et capitaliste. En termes d’émissions de CO2, plus de la moitié des émissions depuis l’industrialisation sont l’œuvre de ces pays capitalistes impérialistes. Cependant, à l’heure actuelle, des pays comme la Chine et l’Inde s’abstiennent de prendre certaines mesures qui ralentiraient leur croissance économique rapide. Cependant, lorsque la Chine et l’Inde rattraperont le niveau de consommation des pays occidentaux, le réchauffement climatique rendra déjà le monde inhabitable. Une fois de plus, il s’avère que le système mondial impérialiste, qui est divisé en États-nations de libre marché, est le plus grand obstacle auquel l’humanité est confrontée. Pourtant, il existe des ressources économiques et sociales pour lutter de manière beaucoup plus radicale contre la crise climatique et ainsi sauver notre planète. Mais ces ressources continuent de s’accumuler dans la richesse d’une poignée de personnes super riches. D’autre part, la stratégie capitaliste elle-même, l’ambition de profit et de cupidité, est totalement incompatible avec l’équilibre écologique. Par exemple, la machine à profit capitaliste continue de détruire les forêts tropicales qui capturent et qui nettoient le CO2. Les contradictions entre la vie écologique et le capitalisme ne sont jamais conciliables. Le « capitalisme vert » ne peut être qu’un gros mensonge.
La crise écologique, combinée à la crise économique capitaliste, nous donne des indices sur ce qui nous attend dans le futur. Nous en vivons les reflets sous la forme de la crise alimentaire mondiale et de la faim en 2021. Le rapport Global Hunger Index (GHI) 2021, publié en octobre, a révélé des niveaux croissants de faim parmi les pauvres et la population travailleuse dans le monde entier. Le rapport indique que « la crise climatique, la pandémie de COVID-19 et la guerre de plus en plus violente et prolongée indiquent un état de faim terrible qui est le résultat de leur combinaison toxique ». Le chômage, la perte de revenus et la forte inflation réduisent le pouvoir d’achat des travailleurs et conduisent à un appauvrissement rapide, tandis que les fortes augmentations des prix des denrées alimentaires font tomber des centaines de millions de personnes en dessous du seuil de faim. Loyers impayés, factures et dettes de crédit, gaz naturel inabordable et files d’attente pour acheter du carburant… Alors que ces conditions difficiles poussent les travailleurs à la lutte, l’extension et la radicalisation de ces luttes sont considérées comme un cauchemar pour les classes dirigeantes. Alors que l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) a annoncé une augmentation annuelle des prix des denrées alimentaires de 32,8% dans son rapport de septembre, l’indice alimentaire de la FAO a atteint des niveaux record de 133 pour la première fois depuis les soulèvements arabes de 2011. Il est normal que les capitalistes craignent les émeutes causées par la famine, car ces chiffres devraient encore augmenter. L’essentiel est de transformer cette peur en cauchemar.
Les Nations Unies avaient averti que le monde faisait face à la pire crise alimentaire depuis 50 ans. D’un autre côté, la possibilité que des gouvernements bourgeois s’effondrent dans le marécage de la dette dans de nombreux pays du monde révèle à quel point cette famine massive peut être dangereuse. Il y a l’exemple du Liban, où les travailleurs sont tombés en dessous de la ligne de la faim à grande vitesse. Qu Dongyu, directeur général de la FAO, résume ainsi la situation : « Aujourd’hui, nous sommes confrontés à des crises alimentaires sans précédent dans de multiples domaines. La faim et la famine sont une réalité aujourd’hui… la situation continue de s’aggraver à l’approche de la fin 2021 ».
Étant donné que les familles des pays sous-développés sont connues pour consacrer la moitié ou plus de leur revenu familial à l’alimentation, il n’est pas difficile de prédire qu’une augmentation de 32% des prix des aliments au cours de la dernière année entraînera la malnutrition. La famine de masse a déclenché des émeutes à travers l’histoire. Il ne faut pas d’y aller il y a si longtemps. Les soulèvements arabes de 2011 ont commencé avec la forte hausse des prix des denrées alimentaires. Maintenant, ces possibilités sont plus fortes que jamais.
Nous, socialistes révolutionnaires, devons être aux premières rangs des luttes environnementales et dresser un programme radical contre le manque de vie, unissant toutes ces revendications à la nécessité de vaincre le capitalisme comme seule issue pour sauver la planète et pouvoir en faire un usage durable des ressources naturelles pour répondre aux besoins essentiels de la majorité de la population, à commencer par l’alimentation.
La jeunesse piégée se prépare aux soulèvements
Les jeunes sont les plus touchés par le chômage et le travail précaire dans de mauvaises conditions. La situation désespérée à laquelle sont confrontés les jeunes sera l’un des facteurs les plus déterminants de la période prochaine. La colère des jeunes contre le système éducatif de plus en plus disqualifié, le chômage, les conditions de travail épouvantables, l’exploitation brutale, les inégalités sociales dégoûtantes et les politiciens autoritaires voraces grandit. Le meilleur exemple en est la jeunesse colombienne, qui s’est rebellée en mai et juin de cette année contre les augmentations d’impôts, la répression et l’ajustement qui ont frappé les travailleurs. Bien que la jeunesse colombienne, qui a combattu courageusement dans les rues et perdu plus d’une centaine de vies, se soit repliée en raison des inconvénients de l’absence de direction, elle a quand même réussi à repousser le gouvernement et à révéler son potentiel révolutionnaire. On avait déjà vu comment les étudiants du Chili se sont levés il y a deux ans quand une augmentation du ticket de métro était la goutte d’eau, générant alors une rébellion générale de tous les pauvres contre le gouvernement et contre le régime hérité de la dictature de Pinochet.
On peut donner un autre exemple de l’État espagnol, où le chômage des jeunes est de 40% selon les chiffres officiels. Les émeutes de masse et les manifestations qui ont suivi l’arrestation d’un rappeur radical et populaire sont une autre indication de la radicalisation de la jeunesse. Dans la rébellion qui a secoué les États-Unis à la suite de l’assassinat de George Floyd, la jeunesse noire a rejoint la jeunesse blanche contre le racisme de la police et de l’administration Trump. La colère des jeunes grandit au Moyen-Orient, en Amérique latine, en Asie et dans de nombreuses régions du monde. Cette colère se manifeste par des mobilisations radicales menées par les jeunes. Cependant, l’absence de partis révolutionnaires d’avant-garde, le manque de perspective et les problèmes de coordination des actions spontanées minent grandement la radicalisation politique et laissent place à des interventions de modération accommodant les politiciens réformistes et syndicalistes.
Par conséquent, il est vital que la forte attitude combative de la jeunesse acquière un contenu marxiste. Le cours logique des actions des jeunes qui se sont rebellés contre le manque d’avenir capitaliste est vers le socialisme et le marxisme. De nombreux sondages, rapports et recherches sur le tournant de la jeunesse vers le socialisme ont paru dans les pages de la presse ces dernières années. Cet intérêt pour le socialisme, encore diffus, nous devons travailler patiemment pour qu’il se manifeste dans la lutte des classes et par le renforcement des organisations socialistes révolutionnaires.
La lutte des classes monte dans le monde
Parallèlement à la crise du capitalisme, nous observons que la classe ouvrière a renforcé la lutte des classes à travers le monde en utilisant son pouvoir enraciné dans le processus de production. Les récents mouvements de grève aux États-Unis, les grèves générales en Corée du Sud et en Inde, les actions radicales de la classe ouvrière iranienne, la grève des métallurgistes de Cadix dans l’État espagnol, les métallurgistes en Afrique du Sud, les ouvriers du Métro au Portugal, ceux du transport en Allemagne, les manifestations ouvrières générales en Tunisie et le mouvement syndical croissant dans de nombreux secteurs en Turquie ne sont que quelques exemples. Toutes ces grèves et résistances font partie de l’émergence d’un mouvement ouvrier mondial. Le capitalisme est globalement intégré, par conséquent, toutes les luttes importantes des travailleurs acquièrent un caractère international. En conséquence, la conscience de classe augmente parmi les travailleurs à l’échelle mondiale. Les actions des travailleurs.euses de la santé du monde entier, qui risquent leur vie dans les ruines des systèmes de santé détruits par les politiques néolibérales, notamment pendant la pandémie, et les luttes des travailleurs.euses de logistique qui ont dû travailler en première ligne pendant les moments les plus sensibles de la épidémie, ont sensibilisé les travailleurs.
Le fait que le système ne se soucie pas du système de santé ou de la vie des employés pour maximiser les profits, alors que les capitalistes font d’énormes fortunes dans le processus, a conduit à une accumulation de colère contre le capitalisme. Ce qui oblige les travailleurs à être plus combatifs, c’est que le chômage et la vie chère les affectent profondément dans des conditions de crise économique et qu’ils sont contraints de travailler dans des conditions de plus en plus précaires. En d’autres termes, la montée des luttes de la classe ouvrière est un processus objectif. Le point critique ici est que la classe ouvrière doit surmonter les obstacles de la bureaucratie syndicale et qu’un nouveau radicalisme ouvrier émergeant des lieux de travail doit diriger tous les segments sociaux mécontents. Lorsque la colère explosive des pauvres, des chômeurs, des jeunes, des femmes et des opprimés se combinera avec le mouvement ouvrier organisé, alors le capitalisme sera en grande difficulté. À cette fin, les initiatives et les comités de base en milieu de travail sont d’une grande importance, qui mettra en évidence les nouvelles dynamiques de vie émergentes.
Promouvoir également des auto-appels pour déborder la bureaucratie, disputer les commissions internes et les corps de délégués, promouvoir l’unité des courants anti-bureaucratiques et classistes pour récupérer des syndicats et promouvoir des coordinations de militant.e.s.
De former des cadres marxistes parmi les jeunes travailleurs et d’établir des liens sectoriels entre eux dans tout le pays est d’une grande importance pour que la lutte des classes fasse un saut qualitatif et quantitatif. La tâche critique des socialistes est de préparer la classe ouvrière à des luttes décisives contre le capitalisme mondial.
La révolte mondiale des femmes continue
L’une des caractéristiques les plus importantes de ces dernières années a été l’émergence du mouvement mondial des femmes luttant pour leurs droits. Il y a des protestations de femmes dans le monde entier contre l’interdiction de l’avortement, le féminicide, le sexisme, la discrimination, le harcèlement, le viol. La mobilisation des femmes a remporté des triomphes importants dans différents pays, comme l’Argentine et l’Irlande par rapport à la légalisation de l’avortement, et aussi la reconnaissance dans les secteurs de la société de l’existence de ces problèmes, invisibilisées jusqu’à récemment.
De même, le mouvement LGBTI + fait entendre sa voix dans le monde entier pour l’égalité des droits contre la violence et la discrimination. La mobilisation des femmes et des personnes LGBTI+ pour dénoncer le système capitaliste sexiste ouvre la voie à la radicalisation. Il est très important que cette dispute devienne une opposition générale au système et s’oriente vers des voies socialistes.
Les femmes travailleuses sont les plus touchées par la crise du capitalisme : les premières à être licenciées, celles qui acceptent des salaires inférieurs et des emplois plus précaires, celles qui souffrent le plus de la pauvreté et de la faim. Dans les pays sous-développés, les mains osseuses de la faim tiennent par le cou les familles, les femmes, les enfants pauvres. Par conséquent, les travailleuses sont prêtes à avancer dans la lutte des classes. La colère accumulée est énorme. Il est d’une grande importance de former des cadres de direction marxistes parmi les travailleuses et les jeunes femmes radicalisées qui ouvrent actuellement la voie sur de nombreux fronts de la lutte des classes. La lutte organisée sur les lieux de travail, les écoles et les quartiers est le seul moyen d’autonomiser les femmes contre l’exploitation et le sexisme. Les socialistes révolutionnaires doivent être capables d’organiser des femmes dirigeantes qui aspirent à être des combattantes pour une nouvelle vie plutôt que des victimes impuissantes du système.
Les défenseurs des tendances réformistes et des politiques identitaires, qui ont du poids au sein du mouvement LGBTI+ et des femmes, ont des effets à la fois organisationnels et idéologiques. Ces courants, qui ne placent pas le capitalisme comme source d’oppression, conseillent au mouvement de se contenter de conquêtes partielles. La politique identitaire, qui cible la « contre-identité », isole de larges segments qui soutiendraient la lutte des femmes et des LGBTI+ et porte un coup à l’unité de la classe ouvrière. Ces deux tendances, qui cherchent à limiter la lutte des femmes et des LGBTI+ pour montrer des acquis qui ne touchent pas au système capitaliste, sont des impasses sans issue et des reculs pour le mouvement. Lutter contre ces influences d’un point de vue de classe et socialiste est vital pour que le mouvement progresse.
Autoritarisme, atteintes aux droits démocratiques, le danger fasciste
Un autre trait distinctif de la période que nous traversons est l’intensification des attaques contre les droits démocratiques, l’autoritarisme et le danger accru du fascisme. Alors que la crise du capitalisme s’approfondit, nous voyons que l’institutionnalisme traditionnel de la démocratie bourgeoise et de l’hégémonie libérale a été ébranlé. Comme dans les années 1920 et 1930, des segments plus larges des classes dirigeantes voient le processus démocratique bourgeois comme un obstacle et les gouvernements fascistes d’extrême droite comme une « solution ».
Des tendances importantes se dessinent aux États-Unis et en Europe occidentale, qui sont les centres traditionnels des systèmes parlementaires libéraux dans le monde. Le fait que Trump puisse encore jouir d’une grande popularité tout en maudissant les « socialistes radicaux qui ont pris le contrôle des États-Unis » est l’expression la plus évidente et la plus dangereuse de cette tendance pour les USA à l’heure actuelle. Dix mois après sa défaite électorale, la position de Trump à la tête du Parti républicain, qui représente une partie importante des classes dirigeantes aux États-Unis, s’est renforcée.
Alors que les échecs de l’administration Biden et la déception des travailleurs et des jeunes s’intensifient, il est très probable que Trump ou quelqu’un comme lui revienne à la présidence avec plus de force. Si le mouvement de classe radical qui a le pouvoir et la perspective de renverser le système bipartite en Amérique échoue, il est clair que le populisme de droite, l’autoritarisme et les mouvements fascistes gagneront en force à travers le Parti républicain. Dès lors, il faut souligner une fois de plus le rôle dangereux joué par des courants comme les Socialistes démocratiques d’Amérique (DSA). Au lieu d’orienter la lutte de classe montante et le dynamisme de gauche vers un projet de gauche totalement indépendant des ailes bourgeoises, le DSA se tourne de plus en plus à droite et théorise sur la nécessité de continuer indéfiniment à soutenir le Parti démocrate impérialiste.
En Europe, l’extrême droite continue de se renforcer face à la crise économique, à l’hostilité envers les immigrés et à l’islamophobie. Aujourd’hui, les partis d’extrême droite ont des positions fortes dans presque tous les parlements d’Europe. Quand la gauche révolutionnaire n’organise pas le mécontentement social, des démagogues populistes de droite, d’extrême droite ou des fascistes -qui se présentent comme anti-système- comblent le vide. Nous avons assisté au deuxième en France. Comme si une extrême droite comme celle de Marine Le Pen ne suffisait pas sur la scène politique, un deuxième homme politique d’extrême droite, Éric Zemmour, qui lui dispute désormais la présidentielle, a fait un grand bond dans les sondages et a monté à la deuxième place. Cependant, la lutte des classes en France avait pris des formes très radicales ces dernières années. Tant le Mouvement des gilets jaunes que les grèves des travailleurs du Métro et des chemins de fer avaient profondément affecté le pays. Malheureusement, quand il n’y a pas de gauche révolutionnaire qui puisse mener ces actions et organiser des militants, ou quand elle est insuffisante, ce sont les mouvements d’extrême droite et fascistes qui profitent de cette situation.
Cet exemple en France montre combien il est vital pour une frange de l’avant-garde (des protestations ouvrières et des manifestations de rue) d’adhérer aux organisations révolutionnaires. Cette couche assurera à la fois la radicalisation des idées dans le mouvement ouvrier et l’établissement de liens entre la classe ouvrière et les organisations révolutionnaires. S’ils ne sont pas regroupés en organisations révolutionnaires, on voit que le radicalisme en action se retire, le virage à gauche est très limité et la droite profite de toutes les opportunités. D’autre part, pour qu’une génération dirigeante de travailleurs et de jeunes émerge, les organisations révolutionnaires doivent d’abord être suffisamment fortes pour que les travailleurs puissent localiser ces alternatives révolutionnaires et les prendre comme référence. Si l’alternative révolutionnaire organisée reste faible, les réformistes de gauche et les bureaucraties syndicales, avec leur loyauté notoire au système, détourneront l’opportunité vers la droite. Cette couche privilégiée de bureaucrates joue un grand rôle dans la montée de l’extrême droite avec son rôle de sape de la lutte des classes.
Parallèlement au danger croissant de l’extrême droite, les tendances autoritaires du système se renforcent. Dans de nombreux pays du monde, les droits démocratiques ne sont pas du tout respectés ou font l’objet d’attaques sévères. Des dirigeants d’extrême droite tels que Modi, Erdogan, Orbán et Bolsonaro mènent des attaques radicales contre les droits démocratiques dans les régimes autoritaires qu’ils tentent d’installer. À la fois, il est quasiment impossible d’exercer les droits démocratiques dans de nombreux pays, de la Chine au Nicaragua, en passant par la Biélorussie ou la Russie, de l’Iran aux cheikhs arabes et en Afrique. Les coups d’État militaires en Afrique sont devenus beaucoup plus fréquents, comme le montre le dernier exemple au Soudan. Le sacrifice héroïque du peuple qui a résisté à la junte sanglante au Myanmar n’a pas encore porté ses fruits.
Le danger posé par les populistes et démagogues d’extrême droite, les mouvements de rue fascistes ou les dirigeants autoritaires ne doit pas être sous-estimés. Le moyen le plus sûr d’arrêter la réaction de l’extrême droite est d’intensifier la lutte des classes. Car la lutte des classes et le socialisme sont les solutions précises à la crise capitaliste. L’espoir d’une nouvelle vie empêchera l’extrême droite d’avoir une chance de gagner du terrain. Les actions de la classe ouvrière réduisent l’espace de l’extrême droite. Car les actions des travailleurs sont de nature internationaliste, elles sont aussi un antidote intellectuel aux tendances racistes, religieuses et anti-immigrés qui divisent la classe ouvrière.
La protection de toutes sortes de droits démocratiques est l’un des principaux devoirs des socialistes. La lutte pour les droits démocratiques est la base de la lutte pour la révolution socialiste. Nous défendons le droit à l’autodétermination des peuples. Le droit de réunion et de manifestation, la liberté de la presse, les droits humains fondamentaux, la liberté d’expression et d’organisation, et les droits syndicaux ; tout cela crée un environnement dans lequel la classe ouvrière peut respirer librement. La tâche principale de la classe ouvrière et des socialistes est de les défendre avec envie.
La force de rue des fascistes est une autre question sur laquelle les socialistes doivent prendre des précautions particulières. Lorsque les gangs fascistes trouvent l’opportunité de s’organiser, ils se renforcent et mènent des actions violentes contre la gauche et les opprimés, avec le soutien qu’ils reçoivent des États. Il est impossible pour les socialistes révolutionnaires d’observer passivement ce processus, ils doivent prendre la tête du mouvement antifasciste et être dans la lutte pour réduire constamment les aires du mouvement et de l’organisation des voyous fascistes. Il est très important de gagner les forces antifascistes, qui créent un fort dynamisme dans de nombreuses régions du monde, pour le marxisme et pour la perspective de classe.
Les équilibres impérialistes vacillent avec les chocs et les tensions
L’expérience de ces dernières années a démontré que les conflits impérialistes se sont intensifiés avec la crise économique capitaliste ; les équilibres bougent et les guerres s’étendent. L’Afghanistan, le Karabakh, l’Ukraine, la Libye, la Syrie, le Rojava, la Palestine, le Yémen, l’Éthiopie, le Sahara occidental, le Soudan, l’Érythrée, le Nigéria, le Cachemire et d’autres ont été les pays où des guerres ont éclaté ces dernières années. Ces guerres, dans lesquelles les grandes puissances impérialistes sont le plus souvent impliquées par l’intermédiaire de tiers sur le champ de bataille, et les nouvelles faisant la queue à la porte, risquent de prendre des formes plus dangereuses avec la crise capitaliste.
L’extraordinaire processus d’exploitation et de croissance que la Chine a accompli depuis le dernier quart du 20e siècle modifie l’équilibre du système impérialiste. L’impérialisme américain, qui a progressivement perdu sa position de seule superpuissance mondiale, investit dans la politique de contenir la Chine de toutes ses forces. La lutte initiée par les États-Unis contre la Chine dans les domaines économique, politique et idéologique s’est transformée en une stratégie de siège qui a intensifié l’armement mondial.
Avec Xi Jinping, la politique d’« ascension pacifique » qui constitue la doctrine officielle de la Chine depuis de nombreuses années, a été remplacée par une politique étrangère plus affirmée et agressive. Le régime du PCC oriente les ressources de l’État vers l’amélioration du développement technologique et des capacités militaires. D’un autre côté, les États-Unis continuent d’approfondir leurs activités politico-militaires et leurs colonies, en particulier en Asie du Sud. Nous en avons vu le dernier exemple dans l’accord de coopération de défense de l’Australie avec les États-Unis et le Royaume-Uni (AUKUS), malgré les réactions intenses de son principal partenaire commercial, la Chine.
L’Accord de partenariat trans-pacifique réunit des pays comme le Japon, le Vietnam, la Malaisie et Singapour avec les États-Unis, préoccupés par la montée en puissance de la Chine. Les problèmes dans des régions telles que Taïwan, Hong Kong et la mer de Chine méridionale resteront des champs de guerre extrêmement dangereux pour les peuples du monde dans les années à venir.
L’approfondissement des frictions et des différends inter-impérialistes entre les États-Unis décadents et la Chine montante pourrait à l’avenir évoluer vers une nouvelle confrontation mondiale aux conséquences imprévisibles pour la survie de l’humanité. Il n’y a pas de champ progressif. Nous, socialistes révolutionnaires, devons rester indépendants et dénoncer les intérêts de chacun d’eux étrangers à la classe ouvrière et aux peuples.
L’impérialisme américain, conscient des limites de sa puissance, réduit son poids au Moyen-Orient par sa stratégie d’encerclement de la Chine. Nous sommes confrontés aux conséquences surprenantes de ce tournant. L’Afghanistan, où l’occupation américaine a pris fin de manière honteuse et où les talibans ont remporté un grand triomphe, en est le dernier exemple. Au Moyen-Orient, il y a un grand conflit entre la Russie, la Turquie, l’Iran, l’Arabie saoudite, Israël, etc. pour remplir les zones libérées par les États-Unis. Il va sans dire que ces conflits ont été très sanglants et que les puissances régionales ont mené des guerres civiles sanglantes à travers leurs partenaires.
Alors que le capitalisme est secoué par la crise, les classes dirigeantes, les États bourgeois et les politiciens deviennent également plus instables. La nature furieuse de l’impérialisme et du système capitaliste d’État-nation pour rechercher des profits et des richesses illimités tend à devenir en formes extrêmes et en guerre dans des conditions de crise. La seule force sociale qui peut lutter contre la guerre impérialiste est la classe ouvrière internationale. Les mêmes processus sociaux objectifs qui ont conduit l’impérialisme aux guerres propulsent la classe ouvrière dans les rangs révolutionnaires. C’est pourquoi notre tâche immédiate est de renforcer l’unité socialiste révolutionnaire internationale de la classe ouvrière.
L’obligation de s’organiser et de se tourner vers la perspective socialiste révolutionnaire
La dépression créée par la crise capitaliste forcera les masses travailleuses à se mettre sur le terrain tout au long des années 2020. Ce ne sont pas seulement nos attentes optimistes. L’Economist Intelligence Unit, filiale de The Economist, a évalué le risque de manifestations sociales de masse comme de « très haute probabilité » dans son analyse de 10 risques qui secoueront le monde en 2022.
Une étude signée par la Fondation Friedrich-Ebert-Stiftung (FES), qui est un instrument de l’impérialisme allemand, analysant les protestations et faisant des prévisions sur ce qui va arriver dans les prochaines années, a conclu que nous vivons une période similaire dans l’histoire aux années 1848, 1917 ou 1968, « quand un grand nombre de personnes se sont rebellées contre l’état des choses et ont manifesté pour exiger des changements ». Le FMI prédit de possibles rébellions et même des révolutions.
En tant que marxistes révolutionnaires, nous devons être conscients que nous sommes face à de grandes opportunités. Cependant, les actions de masse ont de gros obstacles en termes de désorganisation et de manque de perspective. Les formidables expériences de 2019 regorgent d’indications claires à cet égard. Les manifestants qui ont combattu héroïquement au Chili, en Irak, en France et dans de nombreux autres pays ont été incapables de résoudre seuls de nombreux problèmes complexes, tels que vaincre les États bourgeois, les gouvernements, les agresseurs de droite, les tendances conciliatrices de gauche. Pour ce faire, les masses doivent avoir une solide perspective révolutionnaire et une force organisée efficace. D’une part, pour résister à l’agression de l’État bourgeois, et d’autre part, pour éviter le sabotage astucieux des tendances conciliatrices de gauche, les organisations marxistes doivent gagner en pouvoir et en autorité aux yeux des masses.
Alors que les masses se déplacent vers la gauche et que la perspective rouge se renforce, les soulèvements des années 2020 prendront un caractère définitivement révolutionnaire.
Les portes d’une nouvelle situation révolutionnaire s’ouvriront lorsque les masses répondront aux conséquences les plus brutales de la crise capitaliste par des actions et par des grèves et elles se tourneront vers les idées, les symboles, les organisations socialistes révolutionnaires.
Les masses, en particulier les jeunes, sont déjà à la recherche sérieuse d’une alternative. C’est très important, car sans chercher il ne sera pas possible de progresser. La classe ouvrière et la jeunesse passent maintenant par ces étapes. C’est vraiment important. Mais nous savons qu’il faut l’intervention des organisations marxistes révolutionnaires pour que les actions de la classe ouvrière et de la jeunesse atteignent leurs conséquences logiques, c’est-à-dire pour la réalisation des révolutions socialistes.
La LIS et toutes les organisations marxistes révolutionnaires ont de grandes responsabilités à cet égard. Le virage des mouvements spontanés vers une perspective révolutionnaire et l’expansion de l’organisation dépendent de notre efficacité et de notre intervention.
En ce sens, nous devons nous débarrasser du sectarisme, de l’étroitesse d’esprit, de la concurrence aveugle, nous devons organiser le travail en commun dans la plus large unité d’action possible. Ce n’est que par des luttes communes que nous pouvons devenir une alternative pour les masses et briser l’effet rassurant des tendances conciliatrices de gauche. La LIS est prêt à tout faire pour développer une culture de solidarité et de lutte commune entre les organisations marxistes révolutionnaires. La LIS s’organise sur la base d’une nouvelle compréhension dans laquelle les différences secondaires sont discutées avec camaraderie, non comme une raison pour se diviser, et elle a fait des progrès significatifs en peu de temps vers la création d’une grande unité marxiste révolutionnaire au monde entier. Et ce sera un point focal pour les sauts socialistes dans la crise historique du capitalisme que nous traversons, suscitant la solidarité révolutionnaire et la lutte persistante.
Dépasser les tendances conciliatrices et la lutte idéologique
Nous assistons à une polarisation sociale et politique qui va continuer à progresser. Les tendances à droite que nous avons déjà développées sont un des visages de la situation actuelle. L’autre est le virage à gauche de secteurs de plus en plus larges du mouvement de masse. Dans la mesure où l’organisation des socialistes révolutionnaires n’est pas renforcée, ce tournant sera capitalisé par le réformisme, qui tentera de détourner la montée vers le plan électoral et ainsi sauver des gouvernements et des régimes ; la plupart du temps cela finira par aider la droite.
Chaque fois que le système capitaliste est en crise, les partis réformistes de gauche, qui sont les gardiens du système, et dans la plupart des cas la bureaucratie syndicale, qui est sous le contrôle de ces éléments ou de la bourgeoisie elle-même, interviennent pour sauver le système. À titre d’exemples récents, la Concertation, le Front large et le Parti communiste du Chili ; la CUT et le Pacte historique de Gustavo Petros en Colombie ; les partis de l’establishment stalinien du CPI et du CPI (M) en Inde, ont joué un rôle essentiel pour sauver le système en se donnant beaucoup de mal pour contenir les protestations et les grèves.
Dans un passé récent, les hésitations du Parti communiste et de Mélenchon concernant le Mouvement des gilets jaunes en France ont profité à Macron et Le Pen. En Allemagne, le tournant de Die Linke (La gauche) vers le néolibéralisme continue d’ouvrir la voie à l’AfD d’extrême droite. De même, la Rifondazione Comunista italienne a laissé la rue au mouvement populiste de droite Cinq étoiles et à l’Alliance du Nord d’extrême droite. En Grèce, l’eurocommuniste Syriza est devenu le sauveur de la bourgeoisie. Dans l’État espagnol, Podemos a permis au PSOE de revenir au pouvoir. Au Brésil, le gouvernement PT a rendu possible la victoire du semi-fasciste Bolsonaro. En Argentine, le gouvernement de Cristina Kirchner d’abord et maintenant celui de l’ensemble du PJ avec Fernández-Kirchner à sa tête, ont contribué à l’émergence et au renforcement de la droite. Au Venezuela, le gouvernement Maduro est le responsable de faire de la droite un acteur important. En Inde, les partis réformistes staliniens [CPI et CPI (M)] ont jeté les bases du populiste de droite autoritaire Modi. Dans de nombreuses situations similaires, y compris ces exemples, les partis réformistes ont soutenu les politiques néolibérales de coupes sociales et de privatisations. Il n’est pas possible de gagner la direction du mouvement de masse et de transformer la crise capitaliste en une révolution sociale sans vaincre ces forces.
Rejeter le modèle du Parti bolchevique et adopter comme stratégie permanente l’établissement de grands partis de masse avec des forces réformistes, comme suggéré par le Secrétariat unifié (SU-IV) et quelques autres forces, n’est rien de plus qu’une adaptation au réformisme. Cela ne veut pas dire ne pas adopter de tactiques adéquates pour les différents processus qui peuvent se développer dans certaines situations ; mais ces tactiques, qui peuvent inclure la participation à de larges formations anticapitalistes, ne peuvent être stratégiques, ni pour tous les temps et tous les lieux, ni contredire la construction des partis révolutionnaires.
Le monde nouveau qui s’ouvre doit nous trouver attentifs à la possibilité de ruptures à gauche dans les partis de masse et à de phénomènes nouveaux qui ouvrent des opportunités pour la construction révolutionnaire.
De même que les socialistes révolutionnaires doivent toujours se différencier de la gauche réformiste et centriste, ils doivent aussi se séparer des sectaires et des sceptiques qui entravent l’avancée de la lutte et de la direction révolutionnaire où ils ont une certaine influence.
L’un des plus grands obstacles auxquels le mouvement de masse est confronté sont les mouvements postmodernes anti-marxistes, qui soutiennent que le temps de la lutte des classes est finit, dénigrent la lutte pour la prise du pouvoir politique par les classes ouvrières et font de la propagande noire en blâmant le socialisme pour les crimes du stalinisme. Il n’est pas surprenant que les mêmes arguments soient aussi ceux des capitalistes. Les intellectuels et les groupes postmodernes jouent un rôle réactionnaire énorme, posant la lutte pour des identités et des cultures comme un projet de gauche. L’expérience a montré à maintes reprises que le projet de création de petites unités autonomes libérées, qui est peut-être la proposition la plus affirmative de ces groupes, ne représente pas la moindre menace pour le fonctionnement du système.
Pour répondre par une révolution à la crise du système, nous devons réussir à unir les forces marxistes révolutionnaires internationales sur le front le plus large possible et à construire des sections nationales fortes. Cette autonomisation n’est possible qu’avec une clarté idéologique, des méthodes saines, une perspective forte, un travail énergique. Ce n’est qu’ainsi que nous pourrons vaincre les bureaucrates réformistes, qui sont les gardiens du système, et vaincre les tendances centristes qui vacillent entre la révolution et l’establishment. Lorsque nous combinerons l’énorme énergie des masses avec la puissance organisée du marxisme, la période pré-révolutionnaire sera derrière nous et une situation révolutionnaire mondiale commencera.
Approuvé à l’unanimité – décembre 2021